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La Société signataire d’un pacte d’actionnaires la rend-elle partie au contrat et donc débitrice d’obligations ?

Par un arrêt en date du 8 février 2022, la Cour d’appel de Paris (CA Paris, 8 février 2022 – n°19/04499) a eu à se prononcer sur la qualité de partie ou non d’une société, signataire d’un pacte d’actionnaires pour connaître de la recevabilité d’une action en nullité de la clause de non-concurrence stipulée en son sein.

En l’espèce, un pacte d’actionnaires conclu entre les actionnaires d’une société anonyme prévoyant une clause de non-concurrence a été conclu « en présence de la société ».

A la suite de la révocation du Directeur Général de la société, un actionnaire, avançant le caractère abusif du Directeur Général, a agi contre la société pour demander la nullité de la clause de non-concurrence et d’exclusivité, applicable à ce dernier, aux motifs que la société agissait en qualité de mandataire chargé de la gestion du pacte et que dès lors, elle avait la responsabilité juridique de mettre en œuvre certains engagements du pacte.

Le Tribunal de commerce de Paris a, par décision rendue le 17 février 2017, jugé cette révocation abusive et dépourvue de juste motif et a ainsi condamné la société à lui payer la somme de 200.000 euros. Il a également rouvert les débats sur le caractère nul de la clause de non-concurrence, laquelle a été déclarée nulle par un jugement du 22 février 2019, ce dernier ayant par là même condamné la société à payer à l’ancien Directeur Général, la somme de 60.000 euros à ce titre.

La société, requérante, souhaitait infirmer ce jugement par un raisonnement suivi par la Cour d’appel de Paris.

Cette dernière a en effet estimé que, la société n’était pas partie au pacte dès lors que :

  • elle n’était qu’un simple mandataire chargé de la gestion du Pacte et qu’ainsi, les obligations mises à sa charge n’ont que pour effet de lui conférer un rôle de gardienne de la procédure et non de la rendre personnellement débitrice des clauses du pacte en général ; et
  • la clause de non-concurrence n’a été stipulée que dans l’intérêt des investisseurs, parties au pacte, lesquels ont alors seule qualité pour déroger à cette clause.

La Cour d’appel vient donc rappeler, par cet arrêt, la distinction entre la qualité de mandataire d’une société signataire à un pacte d’actionnaires et la qualité de partie qui aurait pu toutefois lui être conférée, notamment si l’obligation de non-concurrence avait été stipulée dans son intérêt (au même titre que ce que l’on trouve usuellement dans un pacte s’agissant de la confidentialité d’informations).

Il conviendra ainsi d’être vigilant à l’égard de la rédaction de ces clauses au sein des pactes d’actionnaires et notamment de stipuler avec clarté le rôle souhaité de la société.

Julien Loth